Exposition de photos de Paul Antoine Pichard intitulée « Mines d'ordures » à la TOHU.
Dans la tradition de la photographie humaniste et engagée, Paul Antoine Pichard présente sa dernière exposition à la Tohu (salle de spectacle, conçue par le Cirque du Soleil dans un souci d’ériger une construction écologique, bâti sur un ancien dépotoir). Il s'agit d'un témoignage éclairé sur les habitants de l'un où l'autre des dépotoirs qui poussent comme des champignons de par le monde. Le photographe globe-trotter a parcouru 9 pays de tiers-monde pour documenter et faire l'inventaire des us et coutumes des nouveaux recycleurs du rebus global, les « savengers ». Ces derniers constituent une nouvelle sous-culture planétaire qui, bien que présentant des particularités locales, ont en commun le fait de vivre au bord, voire au cœur de dépotoirs à ciel ouvert. En effet, nous assistons depuis quelques décennies à la création de cités ou s'entassent des milliers de familles (on parle de 35 000 familles près de Lima au Pérou). Ils y vivent, travaillent, y creusent des tunnels comme dans les mines de l'ère industrielle, dans l'espoir de trouver simplement de quoi survivre. Ils y élèvent des enfants, mangent et boivent à même les déchets de notre société.
Cette exposition, en plus de présenter comment des exclus vivent en marges de la société de consommation, parle du monde contemporain. Le mode de vie des scavengers est l'une des faces cachées de la société d'abondance. A travers les photos de Pichard, les contrastes sont saisissants.
Aussi les commentaires qui accompagnent ces photos nous sortent d'une impression qui pourrait nous apparaître de prime abord sensationnaliste. Il s'agit de réflexions sur l'humain et ses contradictions; un âge où la durée de vie des objets est restreint mais où s'accumulent les sites d'enfouissement d'ordures et où croissent, en même temps, les populations qui ne vivent que de ce que jettent les autres…
« J'ai vu des enfants se battre jusqu'au sang pour manger les reste d'un sachet de thé infusé dix fois, d'autres se jeter sur des arrêtes de poissons. Ça fait quelques chose dans le ventre m'ont-ils dit. »
Pour conjurer le caractère tragique, l'auteur insiste sur le fait que les habitants de ces villes d'ordures ne réclament pas la pitié mais désirent au contraire que nous refusions de cautionner cette fausse fatalité que constitue la surproduction dans nos sociétés d'hyper consommation et l'accroissement des écarts de richesses dans le monde ou nombreux sont ceux et celles qui doivent se contenter des restes… « De ce combat il en va de la pérennité de l'humanité toute entière ».
Cette collection des photos est troublante mais nécessaire. Cœurs sensibles ne pas s'abstenir.
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